La température monte, à tous les niveaux, formant un remarquable ensemble fractal. Est-ce un signe, un enseignement, un avertissement ou un point de non-retour ? Les différentes crises successives que nous vivons nous installent, souvent inconfortablement, dans cette nouvelle ère du changement. Cathartique ?
Beaucoup d’événements, de comportements réveillent nos peurs, nous révoltent, nous interrogent. Les esprits s’échauffent, s’enflamment sans plus aucune commune mesure, en consumant dans leur sillage tout l’art de la nuance et, par contagion, l’esprit démocratique. Tel un processus inflammatoire sociétal, notre système « humanitaire » est-il si déboussolé au point de générer une « tempête cytokinique1 » ou pourra-t-il prendre le dessus et initier la résolution de ce processus ? Dans cette période si bouleversante que nous vivons, il s’agit de prendre le temps de se poser, de se pacifier, d’écouter son cœur et non ses peurs et surtout, de garder la tête froide. Au sens propre comme au figuré. Des liens de cause à effet entre l’inflammation et l’agressivité n’ont-ils pas été démontrés2 ?
L’inflammation n’en demeure pas moins une réaction immunitaire vitale. Elle participe à toute
tentative de notre organisme de se réparer et de retrouver l’équilibre là où il a subi une agression. La première phase du processus est un jeu complexe entre les voies pro et anti-inflammatoires. Elles s’activent toutes deux dès le début avec un léger décalage pour ces dernières qui ont pour fonction de tempérer la réaction (cela a été mis en lumière récemment3). La résolution de l’inflammation intervient quand l’agression est maîtrisée et que les médiateurs anti-inflammatoires prennent le dessus sur leurs inverses pour permettre à l’organisme de tendre vers la guérison.
À quel moment cette inflammation peut-elle devenir problématique ?
Quand l’art de la mesure fait défaut. Quand ce fragile équilibre qui caractérise tout organisme vivant est rompu et que les systèmes de régulation ne parviennent pas à le rétablir. La résolution de l’inflammation ne peut donc se mettre en place, ouvrant la voie à la chronicité. La maladie s’installe, parfois silencieusement. Les protéines et molécules de l’inflammation, initialement salvatrices, deviennent alors progressivement toxiques, menant à la dégradation des tissus et à des dégâts fonctionnels avec le risque de propagation au niveau du cerveau.
La neuro-inflammation
Longtemps, on a cru que le cerveau était protégé de la majorité des effets dévastateurs de la réaction inflammatoire, grâce notamment à la fonction protectrice de la barrière hémato-encéphalique4. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien5. La « neuro-inflammation », c’est son nom, se déclenche lorsque le système nerveux central (SNC) et le système immunitaire s’allient pour protéger le cerveau. Les cellules qui gèrent le système inflammatoire neuronal sont principalement les cellules gliales (productrices de médiateurs pro-inflammatoires IL6 et TNFa notamment) et les astrocytes, mais les neurones et d’autres cellules ont également un rôle. C’est une organisation vraiment très complexe dont tous les tenants et aboutissants ne sont pas encore connus. Cependant, il arrive que ce système se dérègle et s’emballe, tout comme son homologue périphérique. Avec des effets beaucoup plus dévastateurs puisque le SNC possède peu de pouvoir de régénération. Peut-être pour ces raisons, il a développé un système singulier pour faire face aux agressions : un système de drainage particulier, identifié voilà seulement quelques années6. Mais ce système reste fragile quand l’on sait les pertes fonctionnelles auxquelles sont associées les multiples causes et maladies affectant le cerveau.
Les causes et conséquences de la neuro-inflammation
Des liens de plus en plus étroits sont régulièrement mis en lumière entre certaines maladies et la neuro-inflammation. Nous arrivons aujourd’hui (enfin) à la reconnaissance scientifique de l’inflammation comme un mode de déséquilibre homéostatique général dans la genèse de certaines maladies. La liste est longue et va des troubles neurodégénératifs (comme la maladie d’Alzheimer, la SEP, la SLA…) aux troubles psychiatriques (schizophrénie, dépression…). Certaines maladies chroniques comme la dysbiose intestinale, la maladie de Crohn, certaines maladies virales ou bactériennes (herpès, covid, Lyme, parodontite…), l’alcoolisme, l’obésité, le stress et l’anxiété mais aussi les traumas crâniens, les accidents vasculaires (AVC et AIT), un mode de vie inadapté (alimentation, sédentarisme, cycles veille/sommeil…), l’intoxication médicamenteuse, la pollution environnementale augmentent sérieusement le risque de neuro-inflammation.
Neuro-inflammation et mort neuronale
Finalement, tout cela semble très logique. Nous savons que la neuro-inflammation provoque des déséquilibres physiologiques et peut induire la mort neuronale (nécrose, apoptose…). D’un autre côté, le cerveau adulte ne sait produire qu’un faible taux de nouveaux neurones (chez l’être humain adulte, environ 1,75 % du volume par an pour la zone de l’hippocampe). Jusqu’à présent, 2 zones de formation ont été identifiées : l’hippocampe et le bulbe olfactif (heureusement, car, si cela n’avait pas été le cas, une bonne partie de la population serait devenue anosmique depuis le covid). Les scientifiques présument que d’autres régions pourraient également être le siège d’une neurogenèse, comme l’amygdale. Donc, nous avons là un capital qu’il est préférable de bien protéger.
Comment se protéger de la neuro-inflammation ?
Bien sûr, et on ne peut y déroger, la nécessité d’adopter un mode de vie et une alimentation le plus en accord avec ce dont notre corps et notre esprit ont besoin fondamentalement. Ne pas oublier l’importance de les détoxifier régulièrement (voir notre numéro hors-série actuellement en librairie7).
La prise de certains compléments nutrithérapeutiques (polyphénols, magnésium, L-carnitine, vitamines C, D3 et E, sélénium, coQ10, etc.) pourra suppléer aux manques potentiels ou booster certaines fonctions. Certains extraits de plantes comme le
curcuma ou le bacopa, par exemple.
La société La Royale propose depuis quelques mois un complexe intéressant appelé « Neuro-Royal 8». Malheureusement, le prix est élevé (environ 140 euros pour 60 sachets, pour une cure de 1 à 2 mois). Composé de 24 actifs qui visent à protéger le SNC, le produit est utilisé en prévention ou en curatif.
Bien sûr, il est recommandé de consulter médecins et spécialistes en neurologie en cas de suspicion d’une neuro-inflammation. Il s’agira alors d’identifier et traiter les causes possibles.
Quelles huiles essentielles ?
Nous ne pouvons détailler, dans le cadre de cet article, tous les conseils en regard des différentes maladies individuellement.
En revanche, nous proposons d’apporter quelques réflexions et conseils sur les huiles essentielles intéressantes dans le cadre de la neuro-inflammation.
1. Favoriser un bon drainage du cerveau : on en parle peu, car nos connaissances sur le sujet sont encore embryonnaires. Mais c’est un élément essentiel pour son bon fonctionnement. C’est lors de ce drainage que les métabolites toxiques résidant dans le cerveau sont éliminés. Autre élément important, ce drainage s’active uniquement pendant le sommeil !
Une série d’huiles essentielles sont efficaces pour améliorer les troubles du sommeil. En général, on les utilise par la voie olfactive, mais on peut la combiner avec l’application cutanée au niveau des poignets par exemple. En voici quelques-unes bien connues : la camomille noble, la lavande vraie, le petit grain bigaradier, la mandarine verte et le petit grain mandarine, plus efficace grâce à la présence majoritaire (50-55 %) d’une molécule appelée anthranilate de diméthyle mais généralement perçue comme moins agréable à l’olfaction. Il s’avère que ces huiles essentielles sont également anti-inflammatoires.
Une piste supplémentaire est celle des huiles essentielles favorisant le drainage lymphatique : nos préférences vont vers le lentisque pistachier, le géranium rosat et le patchouli, toutes trois excellentes drainantes lymphatiques. Le lentisque cumule également une activité anti-inflammatoire et réduit les concentrations d’un des médiateurs pro-inflammatoires : l’interleukine 6 (IL6), quant à l’HE géranium rosat, c’est une tonifiante des voies veineuses et lymphatiques qui a une activité inhibitrice de l’acétylcholinestérase (AChE), une enzyme impliquée dans le développement de la maladie d’Alzheimer.
2. Protéger le cerveau avec des huiles essentielles harmonisant le système immunitaire, en ciblant l’inflammation. Le système endocannabinoïde (ECS) orchestre une série d’enzymes, de récepteurs (CB1R et CB2R) et de molécules impliquées dans la régulation des fonctions physiologiques du corps et de celles du cerveau en particulier. Il contribue à améliorer les fonctions cognitives, la neurogenèse, à diminuer la douleur et le stress, il lutte contre la neuro-inflammation et la neurodégénérescence dans de multiples pathologies9.
Plusieurs huiles essentielles contiennent des molécules identifiées pour leur activité positive sur l’ECS, dont notamment :
- Le Cannabis sativa : c’est la plante la plus connue. Son huile essentielle ne contient de THC (ligand du récepteur CB1R) qu’à l’état de trace et n’a donc pas d’effet psychotrope. Par contre, elle contient beaucoup de molécules anti-inflammatoires dont le cannabinoïde10 b-caryophyllène. Cette molécule a été étudiée et testée dans nombre d’études scientifiques. Il s’avère qu’elle se lie aux récepteurs CB2R exprimés notamment dans certaines cellules gliales responsables de la régulation de l’inflammation du cerveau et induit, par son effet agoniste, une diminution de l’inflammation.
- Le baume de copahu : contient également une large proportion de b-caryophyllène (50 à 55 %). Il a une action neuroprotectrice, anti-inflammatoire, antioxydante et anticonvulsive. Par sa liaison directe avec les récepteurs CB2R, il est prometteur pour le traitement de la dépression et des maladies mentales liées au stress.
- Le lentisque pistachier : les résultats d’une étude11 suggèrent qu’il préserve de la structure cérébrale, réduit la neuro-inflammation et la perte neuronale.
- La lavande vraie : elle a fait l’objet d’un nombre conséquent d’études sur de potentiels effets antineurodégénératifs. Elle favorise l’élévation du taux de certains endocannabinoïdes circulants contre la douleur, les troubles du SNC, et en particulier la maladie d’Alzheimer.
- Le cèdre de l’Atlas : il ne contient pourtant pas de cannabinoïdes mais montre une activité bénéfique sur l’ECS. Les effets observés indiquent que l’inhalation de l’HE de cèdre active les récepteurs CB1R et CB2R du SNC et les voies modulant la douleur du SNC.
Les études scientifiques des HE basées uniquement sur leurs molécules chimiques n’expliquent pas tout, loin de là. Au même titre, il est important de prendre en compte l’activité de l’huile essentielle dans son entièreté (le « totum ») qui est en fait un mélange synergique entre ses différents et nombreux composants.
Par Pascale Frennet
Pour aller plus loin
- Le sommeil, c’est bon pour le cerveau, S. Laureys, éditions Odile Jacob, 2023.
- Cerveaugraphie : comprendre le cerveau en 100 dessins et schémas, S. Laureys, éditions Odile Jacob, 2022.
- Prévenir les maladies neurodégénératives grâce aux huiles essentielles, Rémy Lejeune, éditions Quintessence, 2020.
- Article avec conseils détaillés et webinaire prévus en avril 2023.
Inscriptions sur le site www.desaromesetdessens.be
1. Emballement, réponse inadaptée, nocive, du système immunitaire entraînant une production excessive de cytokines qui provoque une hyper-inflammation du tissu infecté pouvant, sans traitement approprié, conduire à la mort. 2. Castle et al., 2021. 3. Mendez et al., 2022. 4. Ainsi que le peu d’expression des produits du CMH (système de reconnaissance du soi) et l’absence de drainage lymphatique. 5. La notion de « privilège immunitaire » reste cependant de mise au niveau de certains tissus du système nerveux central. 6. Le système glymphatique et les vaisseaux lymphatiques de la dure-mère. 7. « Détox, équilibre alimentaire et perte de poids », hors-série Biotempo, février 2023.
8. www.la-royale.com. (L’auteure de cet article déclare n’avoir aucun lien d’intérêt avec cette société.) 9. Lejeune R, Prévenir les maladies neurodégénératives grâce aux huiles essentielles, éditions Quintessence, 2020. 10. Les cannabinoïdes sont un groupe de substances chimiques sécrétées par la plante de cannabis et par certains autres végétaux qui activent les récepteurs du système endocannabinoïde (ECS). 11. Quartu et al., 2012.